Culture du mensonge
Nous vivons dans une culture du mensonge. Ce fut peut-être le cas de toutes les cultures, en tout cas celles qui sont considérées depuis plusieurs millénaires comme les plus développées. Cette situation devient toutefois plus apparente aujourd’hui, en tout cas pour certains, comme moi. Je me demande si la vérité est vraiment accessible à l’être humain, ou si elle n’est qu’un attribut divin. Dans le royaume humain, il n’y a pas de réalité objective. Toutes nos perceptions sont subjectives, et peu fiables. Notre vision du monde, et de ce que nous considérons comme la réalité, est basée sur les perceptions de nos sens, d’abord de nos cinq sens physiques, qui nous donnent des informations qui diffèrent d’une personne à l’autre, et qui, même pour soi, peuvent changer d’un jour, ou d’un moment à l’autre. Ces données sont ensuite décodées et interprétées par notre mental, sur la base de nos souvenirs et de nos conditionnements, très peu fiables également, et selon un processus dualiste qui inclut dans toute perception son opposé. Et pour jeter encore plus de confusion, notre centre émotionnel dysfonctionnel colore nos perceptions sensorielles et nos interprétations mentales de nos réactions émotionnelles et de nos états d’âme. Où pourrions-nous donc trouver la moindre vérité ?
Ce qui est considéré comme la vérité, c’est ce que croit la majorité, ce qu’on lui fait croire, ou ce qu’on lui a enseigné, et qui semble faire le consensus. Un exemple est l’histoire, qui fut toujours écrite par les vainqueurs, ou ceux qui étaient au pouvoir. Jusqu’au siècle dernier, il y avait toujours un décalage de temps entre les événements et leur narration, et pour le commun des mortels, peu, ou pas, de moyens de contrôler si la narration correspondait bien aux événements. Aujourd’hui, les choses ont changé, puisque l’information est instantanée et que des millions de documents contradictoires sont disponibles sur l’internet. Ce qui ne rend pas les choses plus faciles, bien au contraire. Comme tous ces documents sont de 2ème, 3ème ou nième main, et que la technologie permet très facilement de transformer, falsifier ou créer n’importe quel document audio-visuel, il est très difficile, sinon impossible, de reconnaître le vrai du faux.
Comme le mensonge, de toute part, semble être le meilleur moyen de défendre son point de vue, on ne sait plus qui croire, et le plus sage serait sans doute de ne croire personne. Mais l’être humain se sent mal à l’aise dans le doute et l’incertitude, et a besoin de croire et de faire confiance à quelqu'un, et ce sera celui à qui il accordera le pouvoir et l’autorité de savoir ce qui est vrai ou faux. Cette autorité à qui la majorité fait confiance, ce sont les médias dominants, la télévision, la radio et les journaux. On sait que ces médias appartiennent tous à des groupes financiers qui contrôlent et formatent les informations qui sont diffusées et censurent celles qui sont contraires à leurs intérêts. Dans la plupart des pays, comme la France, ces groupes financiers contrôlent aussi le pouvoir politique, et ainsi les médias dominants soutiennent les dirigeants politiques qui sont au pouvoir. Ce n’est toutefois pas le cas actuellement aux États-Unis, où, comme les médias dominants appartiennent aux adversaires du président Trump, depuis 4 ans ils se sont opposés systématiquement à sa politique. J’ai d’ailleurs assisté, il y a quelques jours, dans la confusion qui a suivi les élections, à un événement que je croyais impensable : les chaînes de télévision ont interrompu après 31 secondes une allocution du président Trump, c’est-à-dire que les médias se donnent le droit de censurer le président des États-Unis. Ils se donnent aussi le droit de décider ce qui est bien ou mal et ce qui est vrai ou faux.
La liberté d’expression est un concept qui semble appartenir à un autre temps bien révolu. Le mensonge affirme être la vérité, et ceux qui disent le contraire sont accusés de diffuser des fake news, une expression très à la mode dans un monde où tout semble devenir de plus en plus fake. De tous temps, le mensonge a fait partie du langage des hommes politiques, et si on devait interrompre leurs allocutions chaque fois qu’ils disent un mensonge, aucun d’entre eux ne pourraient plus s’exprimer. Le mensonge systématique ne devrait par contre pas être le langage de la presse et des journalistes, dont le rôle devrait justement être de nous aider à pouvoir mieux nous faire une opinion personnelle des situations et des événements du monde en écoutant les arguments des uns et des autres dans un climat de liberté d’expression. Avant de nous retrouver dans une implacable dictature parce que nous aurons pris de malveillants mensonges pour de bienveillantes vérités.
Dans les temps qui courent, il est probablement plus sage de ne plus s’exprimer du tout. Je n’en pense pas moins, et continue d’écrire, mais j’attendrai des temps meilleurs pour publier mes réflexions.
10 novembre 2020, Chiang Mai